Quand le président de l’Ademe parle du futur pour réduire notre facture énergétique d’ici 2030, tout le monde tend l’oreille. Alors que le gouvernement vient d’annoncer une hausse du gaz de 2,5%, ce sujet est plus que vital, il s’inscrit rudement dans la proposition d’un scénario volontariste à échéance 2030. L’interview de son président, François LOOS ouvre en grand le débat national sur la transition énergétique lancé le 29 novembre 2012, l’Agence ADEME propose des scénarios énergétiques et climatiques volontaristes axés sur la maîtrise de la consommation énergétique et le développement de l’offre d’énergies renouvelables. Une réduction de la consommation d’énergie de 20 % d’ici 2030 serait atteignable grâce à des actions fortes sur les logements, tandis qu’une baisse de la consommation énergétique de près de 50 % à horizon 2050 nécessitera d’agir fortement sur le secteur des transports. Ces mesures visent également à diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, comme la France s’y est engagée dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique. L’objectif est d’autant plus réalisable que les consommations d’énergie ont baissé en 2012.

François LOO, le président de l’ADEME nommé depuis le 21 décembre 2011 et renommé en 2012 par le gouvernement de JP Ayrault

> LE CONTEXTE:La contribution de l’ADEME est une des bases de réflexion lors du débat national sur la transition énergétique lancé le 29 novembre 2012.
> LES ENJEUX:Le débat national sur la transition énergétique doit permettre d’élaborer des stratégies durables pour réduire les consommations et la part des énergies fossiles dans le bouquet énergétique français et également atteindre le Facteur 4, c’est-à-dire la division par 4 de nos émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050.
> L’ESSENTIEL :Selon les deux scénarios proposés par l’ADEME, la demande en énergie finale peut baisser de 20 % d’ici à 2030 et de près de 50 % d’ici à 2050. François Loos , Président de l’ADEME s’en explique.

Le débat sur la transition énergétique s’est ouvert le 29 novembre. Comment va se positionner la contribution de l’ADEME ?

-François Loos : Ce débat rassemblera différentes parties prenantes – État, collectivités, salariés, employeurs, associations et parlementaires – et permettra de déboucher sur une loi de programmation en 2013. L’ADEME a naturellement toute sa place dans ce dispositif. Ce travail de prospective Vision 2030-2050, réalisé en interne, permet à l’Agence de proposer deux scénarios qui permettent d’identifier les gisements existants de maîtrise de la consommation d’énergie, le potentiel de développement des EnR, et les filières de croissance verte.

Quel est l’objectif de cette contribution?

-F. L. : La « contribution à l’élaboration de visions énergétiques » est fondée sur deux horizons temporels et deux métho-dologies distinctes. À terme – horizon 2050 –, le scénario proposé doit répondre aux objectifs du Facteur 4, c’est-à-dire la division par 4 des émissions de gaz à effet de serre (GES). À échéance 2030, nous proposons, à partir de la situation actuelle, un scénario « volontariste » axé sur l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables. Ces scénarios ont été établis avec une croissance du PIB de 1,8 % par an et une hypothèse de fécondité haute qui tirent l’ensemble des consommations, et sans réduire les activités industrielles ou encore le niveau des exportations agricoles, c’est-à-dire sans exporter nos émissions de CO2.

Quel est le scénario pour 2030 ?

-F. L. : Une grande partie des actions doit viser le bâtiment. Cela passe par un ambitieux plan de rénovations thermiques concernant l’équivalent de 500 000 bâtiments résidentiels chaque année. Ce plan s’accompagne du déploiement d’équipements de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire plus performants (PAC, CET, CESI). Cet effort est essentiel puisque le secteur du bâtiment représente plus de 40 % de l’énergie finale consommée dans l’Hexagone. Côté transport, nous envisageons une évolution progressive des modes de transport portée par l’émergence de services de mobilité, permettant la pénétration des véhicules électriques, ainsi qu’un report sur les transports collectifs et les modes doux. Côté industrie, nous tablons sur une efficacité accrue grâce à des techniques plus performantes. Coté alimentation, une diminution importante des pertes évitables, le tout sans réduire les exportations. Enfin, pour ce qui est du développement des énergies renouvelables, un effort conséquent sur la biomasse (combustion et méthanisation) est primordial. « Nous avons souhaité nous positionner sur notre cœur de métier : maîtrise de la demande et production EnR. (…) Nous montrons qu’il est possible d’être indépendant du pétrole dans le secteur des transports en 2050. » Quant à l’horizon 2050…

-F. L. : Si le scénario 2030 n’induit pas de changement de paradigme, celui de 2050 s’inscrit en rupture, notamment dans le domaine des transports avec un changement des habitudes. Ainsi, le développement de véhicules serviciels, c’est-à-dire non possédés par l’utilisateur, et un report plus important encore sur les transports collectifs et les modes doux doivent permettre une profonde mutation du parc automobile, constitué pour 1/3 de véhicules électriques, pour 1/3 de véhicules plug-in, et pour 1/3 de véhicules thermiques. Les efforts importants réalisés dans le secteur du bâtiment permettraient de « libérer » le vecteur gaz pour l’utiliser dans les transports, passant ainsi du pétrole au « réseau de gaz » (progressivement décarboné par la montée en puissance de la méthanisation, du BtG, de l’hydrogène, etc.). Le secteur agricole devrait également poursuivre ses efforts sur la voie de la production intégrée (60 % de la surface agricole utile) et de l’agriculture biologique (3 %). L’industrie, dans la continuité des actions accomplies, devrait également voir baisser ses besoins énergétiques. Globalement, la diminution des consommations énergétiques, associée au développement des énergies renouvelables, devrait permettre d’atteindre le Facteur 4.

En quoi les scénarios proposés par l’ADEME se différencient-ils d’autres visions ?

-F. L. : Nous nous sommes intéressés en premier lieu à la maîtrise de la demande énergétique, en détaillant finement l’ensemble des gains énergétiques possibles sur tous les postes de consommation, alors que les autres acteurs privilégient en général soit une approche par l’offre énergétique (notamment au travers du mix électrique), soit une approche purement macroéconomique. Nous avons ainsi souhaité nous positionner sur notre cœur de métier : maîtrise de la demande et production EnR. Nous avons donc fait le choix d’éviter d’entrer dans un débat sur le mix électrique de 2050.
Par ailleurs, nous montrons qu’il est possible d’être indépendant du pétrole dans le secteur des transports en 2050 : voilà un des messages forts de notre étude*** qui nous différencie des autres scénarios.

Domoclick.com avec l’Ademe

Le dossier de 32 pages: Contribution de l’ADEME à l’élaboration de visions énergétiques 2030-2050:
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http://ecocitoyens.ademe.fr/