L’industrie numérique représentera près de 20% du PIB mondial d’ici 2030. Cet énorme enjeu force l’Europe et la France a se mobiliser avec un plan Big Data pour contrer les quatre géants du Net Américain qui ont façonné les technologies du web dès 2000 au point d’en imposer leurs préférences. Les industriels Français proposent 14 pistes pour contrer Facebook, Google, Amazon et Apple tandis qu’ Orange veut s’emparer des objets connectés et GDF Suez de gérer la ville intelligente. Cette stratégie groupée répond aux récentes déclarations d’Axelle LEMAIRE, la secrétaire d’Etat chargée du numérique, qui se mobilise également pour que la France se dote d’un cadre législatif et l’Europe d’une politique numérique. Elle déclarait le 26 juin dans l’Usine Nouvelle « qu’il faut penser Européen et se projeter dans les services numériques de demain ». L’article sur le Big Data des Echos est suivi du reportage de l’AFP à New York sur les start-up à la française qui mettent en vitrine la « French Touch », une manifestation présidée par Fleur PELERIN, la secrétaire d’État chargée du Commerce extérieur, de la Promotion du tourisme et des Français de l’étranger (Photo)

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(Photo de Fleur Pellerin, secrétaire d’Etat au commerce extérieur, tourisme et aux Français de l’Etranger, à la conférence French Touch à New York le 26 juin 2014
. photo par afp.com de Stan Honda)

La France n’a pas créé le Google du numérique, fera-t-elle mieux dans le Big Data, une terre encore en friche ? C’est l’objectif affiché du plan validé par Arnaud Montebourg la semaine dernière dans le cadre des 34 plans pour la France industrielle et dont « Les Echos » du 2 juillet*** ont obtenu copie. A l’heure où les géants du Net Apple, Amazon ou Google avancent leurs pions dans les voitures, l’habitat, la santé, exploitant le Big Data comme « une arme de guerre » et s’attaquant « à des pans entiers de l’économie », « il faut convaincre les grands groupes que leurs industries sont en train d’être remplacées par des services », explique François Bourdoncle, coauteur du rapport au côté de Paul Hermelin (Capgemini). Le cœur du plan, qui comprend 14 pistes, est constitué de projets de service émanant de grands industriels comme Orange, La Poste, Covéa, AXA ou GDF Suez.

L’assurance est particulièrement menacée par le Big Data

Dans l’assurance l’analyse fine du client remet en cause le principe fondateur, basé sur « la mutualisation du risque ». Si les mauvais assurés risquent d’être chassés par les compagnies d’assurances, ces dernières pourront aussi perdre leurs meilleurs clients, ou devoir casser les prix pour les retenir. Covéa, qui coiffe la MAAF, MMA et la GMF, pilote deux projets. Le premier cible les jeunes conducteurs et prévoit de croiser les données comportementales (navigation Internet, centres d’intérêt, pratiques sportives) et l’attitude au volant, afin de faire de la pédagogie auprès des jeunes, ou leur proposer des incitations tarifaires. Autre exploitation du croisement des données : la lutte contre la fraude, l’un des fléaux du secteur.

Une première salve

Pour contrer Facebook et son exploitation massive des données personnelles, la Fédération Internet nouvelle génération, accompagnée d’AXA, de La Banque Postale et de la Société Générale, explore la création d’un « espace de ­confiance », où l’individu pourrait contrôler l’ensemble de données le concernant, et dont il pourrait faire émerger des applications. Pour le moment, la gouvernance de cette plate-forme n’est pas définie.

Orange mise sur les objets connectés.

De son côté, Orange va tenter de constituer une plate-forme agrégeant les données issues des objets connectés, dans le but de permettre à des start-up de développer des services pour les utilisateurs. L’idée : créer une sorte d’App Store pour les objets connectés. Pour l’opérateur français international, l’enjeu est à la fois de fédérer un écosystème, en attirant grands groupes, fabricants d’objets et développeurs, tout en respectant la vie privée des utilisateurs.

Dans l’énergie, GDF Suez, accompagné par Alstom et des PME, ont présenté un projet de plate-forme de centralisation des données, combinant données énergétiques, de transport et tout ce qui est relatif à la ville intelligente. « Un opérateur d’électricité pourra par exemple allouer en temps réel l’électricité à une flotte de voitures électriques en fonction du comportement des utilisateurs », dit le rapport. D’autres projets, à l’image d’une plate-forme que pourraient opérer Air France et Accor pour contrebalancer les américains comme Booking, n’ont pas été jugés suffisamment aboutis pour être présentés. « Mais ce n’est qu’une première salve, d’autres choses viendront », dit un membre du groupe de travail.

Ce plan Big Data suggère aussi à l’Etat de soutenir financièrement le développement de start-up, via la BPI. Ce qui coûterait « quelques dizaines de milliers d’euros », selon un membre du gouvernement. Mais il s’agirait de fonds puisés dans des enveloppes existantes, dédiées au Big Data ou à la French Tech, le label de Fleur Pellerin, doté de 215 millions d’euros.

*** En savoir plus sur Les Echos avec Sandrinne CASSINI pour Les Echos du 2 juillet:
http://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/0203622549314-un-plan-big-data-pour-contrer-les-geants-du-net-1022096.php?U823Sxz7OqHfZq2m.99

A New York, les start-up à la française mettent en vitrine la « French Touch »

Armés de leur envie d’en découdre, gonflés d’un optimisme naissant, des centaines d’acteurs du monde de la Tech française ont lancé cette semaine à New York une offensive visant à défendre les couleurs des start-up hexagonales à l’étranger.
« La France n’est pas qu’un vivier d’ingénieurs, c’est aussi un pays où on essaie de toucher les étoiles » et de créer des sociétés pesant plusieurs milliards de dollars, assure Gael Duval, créateur de la conférence « French Touch ».Cet entrepreneur a déployé la grosse cavalerie pour porter l’étendard de la start-up à la française avec cet événement qui se tient depuis jeudi en pleine scène high-tech de la « Silicon Alley » new-yorkaise.

La une du quotidien Les Echos du 7 juillet 2014
La une du quotidien Les Echos du 7 juillet 2014

Quelque 600.000€, financés à environ 20% par les pouvoirs publics, et huit mois de préparation ont été nécessaires à la naissance de cette première vitrine annuelle de deux jours de l’entrepreneuriat français, rassemblant 500 entrepreneurs, investisseurs ou incubateurs hexagonaux et américains. Deux membres du gouvernement ont traversé l’Atlantique pour soutenir l’initiative privée: la fondatrice du mouvement plus global French Tech, Fleur Pellerin, désormais secrétaire d’Etat au Commerce, et la franco-canadienne Axelle Lemaire, qui l’a remplacée à la tête du portefeuille numérique.

Le mot d’ordre est clair: fédérer les actions pour donner plus de visibilité et redorer le blason « d’un écosystème (…) d’entrepreneurs extrêmement ambitieux, capables d’être en rupture », d’innover et de réussir, explique Gael Duval.
Et « il faut surtout travailler à donner aux entreprises d’autres perspectives de croissance que de se faire racheter par des entreprises étrangères », ajoute Fleur Pellerin, qui invite les entreprises françaises à n’être pas seulement « optimistes » mais aussi « offensives ».

– Beaucoup reste à faire –

Le travail de séduction, ou de pédagogie, reste énorme. « Culturellement, l’entrepreneuriat va un peu à l’encontre de la culture française », estime le fondateur de la société de capital risque ff Venture Capital, John Frankel, citant notamment le niveau « d’implication du gouvernement » plutôt que de l’individu dans l’économie et les lois « peu flexibles pour permettre aux start-up d’embaucher et de licencier ».Mais dans l’Hexagone, les choses bougent, veulent croire les participants. Les dernières réformes sur la fiscalité, la flexibilisation du droit du travail, les efforts pour aider les entreprises à décoller et simplifier les lourdeurs administratives, ne sont pas passées inaperçues.

« On s’est longtemps plaints qu’on n’avait pas forcément les moyens », reconnaît Mickael Froger, fondateur de Lengow, une société visant à optimiser la visibilité et la rentabilité d’e-commerçants, qui salue dorénavant « le travail mis en place ».
Pour ce créateur d’une société présente dans 18 pays et comptant 75 employés, l’un des plus gros obstacles pour les Français reste la confiance en soi.
Aux Etats-Unis, « ça paraît normal d’être un leader mondial, alors que nous, on y va par étape, tranquillement, et si on nous motive un peu, on se dit oui, on peut peut-être y aller », avance l’entrepreneur de 33 ans, qui rêve d’un destin mondial à la Criteo.

– Le meilleur des deux mondes –

Réussite par excellence de la high-tech française, Criteo, le spécialiste du ciblage publicitaire sur internet, pèse déjà près de 2 milliards de dollars en Bourse après une entrée au Nasdaq à Wall Street fin 2013. Mais son unité de Recherche & Développement est parisienne. »On veut donner l’inspiration à plein d’autres gens pour monter des start-up et grandir » à cheval sur les deux continents, explique à l’AFP son fondateur, Jean-Baptiste Rudelle.

« Si on peut multiplier ce modèle et avoir d’autres gens avec cette même vision et essayer d’avoir le meilleur des deux mondes, je pense qu’on peut développer et accélérer très fortement notre écosystème », assure-t-il. C’est un effort de très longue haleine, souligne Alex Iskold, qui dirige l’un des plus grands incubateurs américains de start-up, Techstars. Aux Etats-Unis, « on commence juste à voir émerger une seconde génération d’entrepreneurs qui deviennent eux-mêmes des investisseurs providentiels (angels) ». Car, un écosystème +tech+ bouillonnant « demande plusieurs cycles de créations de start-up qui réussissent: c’est ce qui s’est passé dans la Silicon Valley, c’est ce qui se produit actuellement à New York et c’est ce qui pourrait arriver à Paris, si tout se passe bien ».

Domoclick.com avec Prune PERROMAT pour l’AFP
et Sandrinne CASSINI pour Les Echos du 7 juillet 2014

http://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/0203622549314-un-plan-big-data-pour-contrer-les-geants-du-net-1022096.php?U823Sxz7OqHfZq2m.99