L’entrée en vigueur de la Contribution Climat Energie, la taxe carbone, au 1er juin 2010, était impopulaire avant même que le Conseil Constitutionnel la censure. Les chiffrages du ministère montrent que, pour les contribuables, le coût sera de 45 euros en espace rural et de 21 euros en espace urbain. Selon l’Ademe, le chiffrage est estimé respectivement à 150 euros pour les ruraux et à 60 pour les citadins. Contrairement à ce qui a été annoncée, cette facture de la fiscalité verte n’a pas été inventée par le ministre Jean-Louis BORLOO. Mathieu Begaud , universitaire en Grande-Bretagne, passe ici en revue les solutions européennes et dans le monde.

En Septembre 2009, les conclusions rapportées par la commission menée par l’ancien premier ministre Michel Rocard avaient fait bien des vagues. Présentées comme  « révolutionnaires » par le Président de la République Nicolas Sarkozy? elles se retrouvaient sur le devant de la scène politique française, créant polémiques sur polémiques.
 
Pourtant, en regardant au-delà de nos frontières, on s’aperçoit très vite que cette taxe n’est pas nouvelle, loin de là. La Suède, la Finlande et le Danemark ont tous mis en place la taxe pigouvienne dès les années 90. Et avec succès. En 2005, le Danemark a pu réduire ses émissions carbone de 15% per capita comparées au niveau de 1990, tout en soutenant une croissance économique stable. La baisse pour la Finlande est d’environ 5% sur la même période. Même si d’autres résultats sont plus mitigés, les effets bénéfiques sont incontestables.
 
La Grande-Bretagne, en tant que place financière mondiale, contribue en grande partie à la dynamique du système de bourse du carbone au sein du marché des permis d’émission de CO2 européen ou « European Union Emissions Trading Scheme » (EU ETS*) – bourse permettant d’échanger des « permis de polluer » dont le prix fluctue en fonction de l’offre et de la demande. De plus, le gouvernement travailliste de Tony Blair a mis en place dès 2001 la « tax levy » , la taxe sur la consommation d’énergie du secteur industriel et commercial, ainsi que sur le secteur public. Un système très proche de celui prévu pour notre taxe carbone puisqu’il taxe les énergies fossiles de la même manière. Une différence notable, les particuliers ne sont pas concernés et les carburants sont taxés différemment, ce qui en limite la portée : par exemple, le pétrole n’est pas compris dans le programme.

Le « Carbon Trust », organisme britannique prépare la transition de l’économie basée sur la consommation d’énergie fossile à une économie « Zéro Carbone ».

 Ce système soutient également la compétitivité des entreprises en les poussant à investir dans la croissance verte, a vu la naissance du « Carbon Trust », organisme visant a préparer la transition de notre économie basée sur la consommation d’énergie fossile à une économie « Zéro Carbone ». En Grande-Bretagne, cette organisation est un pilier pour la stratégie de réduction des rejets des équivalents carbone dans l’atmosphère. Elle guide entreprises et collectivités dans leurs démarches de mises aux normes environnementales. En effet ce processus est souvent mises à mal par des directives incertaines venant de Bruxelles ou du gouvernement, ce qui se traduit par un manque de visibilité et de clarté pour les entreprises qui s’engagent dans des démarches de développement durable comme pour les administrations volontaires.
 
Beaucoup d’autres initiatives ont vu le jour en Nouvelle-Zélande, au Canada, ou encore dans certaines villes américaines.
 Cette taxe n’est pas sans risque. En effet la Chine a récemment fais savoir que des taxes carbone douanières à la frontière feraient l’objet de représailles si elles sont mises en place. Ce genre de taxe apparait pourtant nécessaire si l’on veut que cette taxe aboutisse à une réduction signifiante des émissions carbone à une échelle mondiale. On pense alors aux conséquences de la naissance de ‘paradis carbone’, équivalents de nos actuels ‘paradis fiscaux’ si controversés… Les entreprises se délocaliseraient vers les pays qui n’appliquent aucune taxe carbone, pénalisant ainsi les pays volontaires. Clairement l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) aura son mot à dire, peut-être même qu’elle aura le dernier – ce qui est potentiellement une bonne nouvelle. Car mis à part un manque d’humanisme notoire, l’organisation œuvrant à la libéralisation du marché a le mérite de simplifier toutes réglementations possibles.
 
La communauté internationale est unanime, il faut utiliser des outils économiques pour internaliser les émissions de CO2 causant le réchauffement climatique. Mais il reste encore beaucoup à faire.
 
Uniformiser et harmoniser les taxes environnementales au niveau international est une priorité. Clairement il faut éviter les meli-melo fiscaux, Jusqu’ici, La France, en appliquant la taxe carbone à tous les secteurs, demeure la plus grosse économie au monde adoptant cette démarche. Cela représente une grande avancée qui ne peut être critiquée, car comme on l’entend tous les jours, il faut agir en urgence. Espérons simplement que l’exception française ne pénalise pas ce pays pour son action. Beaucoup est attendu de Copenhague, nous ne pouvons qu’espérer que les bons élèves seront entendus.
Domoclick.com

Mathieu Begaud
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EU ETS:
http://ec.europa.eu/environment/climat/emission/review_en.htm

Barème de la taxe carbone 2010 (CCE) sur le site de l’ADEME qui augmentera de 8 à 10%/an d’ici à 2020 :
http://www2.ademe.fr/servlet/KBaseShow?sort=-1&cid=96&m=3&catid=23331