La loi pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové (ALUR) supprime le coefficient d’occupation des sols (COS) dans le règlement du Plan Local d’Urbanisme (PLU). Une nouvelle disposition qui permet plus de largesse lors de la délivrance des permis de construire. A moins que les maires défavorables à la densification de leur commune ne trouvent d’autres moyens de limiter la constructibilité. Explications d’ Alexandra Boquillon pour VotreArgent.fr***

La crise financière a stoppé la croissances des primo-accédents. A  suivre sur data-publica.com/
La crise financière a stoppé la croissances des primo-accédents. A suivre sur data-publica.com/

Aujourd’hui, avec la suppression du Coefficient d’occupation des sols (COS), la constructibilité est logiquement plus importante mais reste toujours encadrée par les règles gabaritaires fixées par le PLU (hauteur, prospect, emprise) qui, elles, n’ont pas été abrogées.

Seul mot d’ordre de la part du gouvernement : DEN-SI-FIER ! La loi pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové (ALUR) modifie l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme et supprime le coefficient d’occupation des sols (COS) ainsi que la possibilité de fixer une superficie minimale des terrains constructibles dans le règlement du plan local d’urbanisme (PLU). Le COS ? Comment permettait-il de limiter la constructibilité ? Si dans votre quartier, le COS était par exemple de 0,2 (soit 20%) et que vous disposiez d’un terrain de 1000 m2, cela signifie que vous pouviez obtenir un permis de construire pour une maison de 200 m2 habitables maximum. A condition encore que votre terrain possède la surface minimale requise afin qu’il soit considéré comme constructible. C’est-à-dire que si votre terrain mesurait par exemple 970 m2 dans une zone urbanisable qui exigeait un seuil minimum de 1000 m2, vous n’aviez alors aucun droit, aucune possibilité d’y ériger le moindre bâti. Et votre parcelle ne valait rien.

Application immédiate
Aujourd’hui, sans le COS, la constructibilité est logiquement plus importante mais reste toujours encadrée par les règles gabaritaires fixées par le PLU (hauteur, prospect, emprise) qui, elles, n’ont pas été abrogées. L’absence de superficie minimale des terrains constructibles permet également plus de constructibilité. Avec la loi ALUR, même les petits terrains deviennent, a priori, potentiellement constructibles. La suppression du COS et de la superficie minimale sont entrées en vigueur le 27 mars 2014, au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, sans besoin de décret d’application particulier. Certains propriétaires n’ont d’ailleurs pas perdu de temps. A l’instar de ce constructeur provençal qui a acheté pour 320 000 euros un terrain de 1500 m2 dans le Pays d’Aix. Il l’a divisé en deux et a fait construire sur chaque parcelle de 750 m2 une villa de 150 m2, revendue 350 000 euros chacune. Une opération très rentable qui avant la suppression du COS aurait été plus limitée. Et les belles transactions se multiplient. Pour preuve, à Aix-en-Provence, dans le cadre d’une succession, une vieille ferme de 250 m2, datant du 19ème siècle, entièrement à rénover, dotée d’un terrain de 4000 m2 constructibles était à vendre à 450 000 euros. L’agence Aix à Part a suggéré aux héritiers de vendre la maison avec 2000 m2 de terrain et 2000 m2 de terrain séparément : ils ont ainsi récupéré 2 fois 320 000 euros ! Et l’acquéreur du terrain de 2000 m2 n’a pas eu à se soucier de la superficie minimale exigée dans cette zone.

Une mesure attractive

Pourquoi l’Etat a-t-il accordé cet asouplissement aussi rapidement ? Réponse : pour pallier la crise du logement. Une aubaine pour la mairie de Paris qui souhaite densifier la capitale, notamment en surélevant des petits bâtiments. Au grand dam du groupe écologiste (EELV) ! Mais depuis mars, les rehaussements d’immeuble sont déjà facilités par la loi ALUR qui a supprimé le COS. Et le PLU parisien en cours de modification ira dans ce sens, en favorisant la création de 10 000 logements par an. Pour autant, « nous n’allons pas construire des immeubles de 50 étages en plein coeur de Paris », assurait Jean-Louis Missika, maire adjoint en charge de l’architecture et de l’urbanisme, lors d’une interview accordée le 6 juillet dernier au Journal du Dimanche. En tout cas, Paris recèle un potentiel très important. Et les architectes parisiens indisponibles pour répondre à nos questions semblent déjà débordés, en visite d’un chantier à un autre ou « en rendez-vous avec… la mairie de Paris » selon le secrétariat d’un cabinet francilien.

De farouches opposants

Si ces nouvelles dispositions enchantent notamment les particuliers, les constructeurs, les lotisseurs, les architectes et la mairie de Paris, elles inquiètent tout autant certains maires en province. Mi-juillet, Jean-Paul Fournier, le sénateur-maire de Nîmes, a dénoncé devant le Sénat les atteintes que la loi ALUR portait à la qualité des paysages typiquement méditerranéens. « Je me battrai pour préserver l’identité de la garrigue », martèle depuis l’édile. Lors d’un entretien téléphonique, la mairie de Nîmes nous a fait part de ses préoccupations tel que le manque d’équipement public, l’assainissement collectif inexistant sur des parcelles inférieures à 1000 m2 (« des micro stations d’assainissement existent mais coûtent une fortune »), les contraintes en matière de risques naturels importants (feux de forêt, inondation)… « De toute façon, c’est le service en charge de l’urbanisme à la mairie qui élabore et révise le PLU. Rien n’empêche les auteurs d’y introduire des règles supplémentaires contraignantes », souligne Bernard Lamorlette, avocat parisien au sein du Cabinet LVI avocats associés. Justement, le PLU de Nîmes est en cours de révision pour tenter de « limiter la casse », en renforçant les règles gabaritaires (hauteurs restreintes, une emprise au sol faible, une seule construction par parcelle…).

Un COS maquillé

Cannes est l’une des premières à déployer ces armes supplémentaires pour lutter contre la densification, en particulier sur les hauteurs de la ville, où le COS était très faible. De plus, l’article 5 du PLU stipulait que pour être constructible, le terrain devait mesurer 5000 m2 minimum. Autant dire que les Cannois ne pouvaient rien édifier dans cette zone. Or, la loi Alur a du jour au lendemain pulvérisé tous ces verrous. Depuis, la mairie s’affaire à trouver une parade. « Cannes a introduit une modification à l’article 13 du PLU qui prévoit qu’un terrain situé dans ce zonage devra comporter au moins 85% d’espaces naturels et 10% d’espaces lisses, c’est-à-dire sans bâtiments couverts, seules une dalle, une terrasse ou une piscine seront autorisées. Résultat : il ne reste que 5% disponibles pour l’emprise des bâtiments habitables », témoigne Bernard Lamorlette, spécialiste en droit immobilier. Si le PLU est voté en l’état, ces nouvelles règles ultra contraignantes seront applicables à l’automne 2014. La mairie de Cannes aura ainsi reconstitué une sorte de COS très faible. Tout en contournant la loi Duflot.

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