Depuis le demi-échec de Copenhague, l’environnement peine à se faire entendre des politiques. Un vent de désaffection souffle sur l’écologie du côté des climato-sceptiques que du côté des contribuables anti-taxe carbone. D’autant plus que le calendrier met la pression sur de nouvelles échéances en France. « Si ça tangue si fort en ce moment, c’est qu’entre Copenhague et l’approche de la loi Grenelle 2 à l’Assemblée nationale début mai, les lobbies sont déchaînés », juge Arnaud Gossement, fondateur du Réseau Droit et Environnement. Témoignages optimistes réunies par l’AFP à mettre en perspectives avec les nouvelles initiatives prisent par 75 pays de l’ONU le 31 mars

Après le demi-succès à Copenhague, la France a abandonnné la taxe carbone laisse le Grenelle de l’environnement au milieu du gué: la Fondation Nicolas Hulot a claqué la porte le 30 mars , les autres ONG restent, mais sur un mode vigilant face au retour en force des « lobbies » qui, souligne-t-elles, l’emportent sur la rocade du Grand contournement de Strasbourg ou s’énervent contre l’énergie éolienne…

Avec le revers de la majorité aux élections régionales en France, l’environnement paraît servir de victime expiatoire. Comme s’il avait eu son heure de gloire et que celle-ci fut passée. Pour Sébastien Genest, vice-président de la fédération France Nature Environnement, le sommet mondial sur le climat en décembre au Danemark a laissé un sentiment d’échec « qui a impacté l’esprit collectif et laisse une certaine morosité ». Les tensions actuelles, selon lui, montrent que « la classe politique est encore loin d’être majoritairement convaincue: elle a l’environnement à l’esprit, elle le gère, mais comme un dossier supplémentaire, une contrainte plutôt qu’une opportunité ».

« Pourtant, insiste-t-il, en cas de crise sociale, on demande davantage de dialogue social et bien c’est la même chose avec l’environnement: il est urgent de continuer de se battre ». « Si ça tangue si fort en ce moment, c’est qu’entre Copenhague et l’approche de la loi Grenelle 2 à l’Assemblée nationale début mai, les lobbies sont déchaînés », juge Arnaud Gossement, fondateur du Réseau Droit et Environnement.

« Mais ceux qui attendaient la révolution du jour au lendemain étaient bien naïfs. C’est la mise en oeuvre du Grenelle et des déclarations d’intention qui coince aujourd’hui. On est en pleines turbulences, mais au moins il se passe quelque chose ».

« On voit que ce qui a manqué au Grenelle, c’était une vrai réflexion sur le modèle économique. Et aujourd’hui, on rentre dans le dur. Les intérêts économiques se figent », estime Christophe Aubel, directeur de la Ligue ROC pour la préservation de la faune sauvage. Avec ses propos au Salon de l’Agriculture – « l’environnement ça commence à bien faire » – le chef de l’Etat « a ouvert les vannes à tous ceux qui avaient envie de s’opposer », ajoute-t-il. « Mais Copenhague avait sans doute décomplexé les écolo-sceptiques ».

Engagé et convaincu, Xavier Joly, directeur de la société Frey Méthanergy qui produit de l’électricité à partir du biogaz (méthane) de décharges publiques, constate, au vu des reculs actuels, que « les décideurs n’ont pas encore accepté de changer de modèle ». « L’environnement n’est pas rentré dans leurs gènes. Mais ça ne peut pas être un sujet parmi d’autres: on y reviendra forcément. Malheureusement on risque de devoir attendre… »

En vieux sage, l’astrophysicien Hubert Reeves, également président de la Ligue Roc, préfère relativiser: « l’absence de résultats tangibles à Copenhague et les dernières élections en France ont certainement ralenti l’élan. Mais qu’il y ait des péripéties, c’est normal: on ne pouvait s’attendre à ce que tout se transforme comme par miracle, du jour au lendemain ».

75 pays s’engagent à réduire l’effet de serre d’ici 2020

Autre note positive ,la déclaration de soixante-quinze pays qui ont pris des engagements pour réduire ou limiter leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020, mais ces promesses, dans le cadre de l’accord de Copenhague, restent insuffisantes pour limiter la hausse du thermomètre mondial à deux degrés.

Ces pays – une quarantaine de pays industrialisés, une trentaine de pays en développement – représentent plus de 80% des émissions mondiales, a précisé mercredi l’Onu, lors de la publication de cette liste, trois mois après le final dramatique du rendez-vous danois. « Il est clair que si les engagements sur la table représentent un pas en avant important (…), ils ne suffiront pas à limiter le réchauffement (de la température moyenne de la planète) à deux degrés », a reconnu Yvo de Boer, secrétaire général de la Convention de l’ONU sur les changements climatiques (UNFCCC)*.

Négocié à l’arraché par une vingtaine de chefs d’Etat dans les dernières heures du sommet, l’accord de Copenhague retient la référence aux deux degrés mais reste très évasif sur les moyens et les échéances nécessaires pour y parvenir.

Au-delà des promesses d’action, qui avaient pour la plupart été annoncées séparément mais sont désormais recensées dans un texte unique, l’Onu souligne que 111 pays plus l’Union européenne ont indiqué qu’ils « soutenaient » cet accord dont les délégués réunis au Danemark avaient simplement « pris note ». Les principaux pollueurs de la planète – Chine et Etats-Unis en tête – sont présents dans cette liste qui va de l’Albanie à la Zambie, en passant par le Bangladesh, la Côte d’Ivoire, la Nouvelle Zélande ou encore Trinidad et Tobago.
L’UNFCCC comptant 194 pays, plus de 80 ne se sont donc pas encore prononcés.

Domoclick.com avec l’AFP

UNFCCC en Français:
http://unfccc.int/portal_francophone/items/3072.php

*Introduction du site de l’UNFCCC : « La température moyenne sur terre a augmenté de 0.6 degré Celsius depuis la fin des années 1800. On s’attend à ce qu’elle continue d’augmenter de 1.4 à 5.8 degrés Celsius d’ici à l’an 2100 — ce qui constitue un rapide et profond changement. Même si la prédiction minimale venait à se produire, elle serait supérieure à toute autre tendance sur 100 ans au cours des 10 000 dernières années.

Les principales raisons de cette montée de température sont un siècle et demi d’industrialisation avec: la combustion de quantités de plus en plus élevées de pétrole, d’essence et de charbon, la coupe des forêts ainsi que certaines méthodes agricoles ».