La filière photovoltaïque est sous le choc ! Quatre mois après la baisse de 12 % des tarifs de rachat, les industriels français du photovoltaïque subissent un nouveau revers avec ce moratoire de trois mois officiellement « décrété » depuis le 9 décembre. Cette décision fait déjà des victimes industrielles avec Fisrt Solar qui a annoncé le gel de son projet d’usine de panneaux photovoltaïque à Blanquefort près de Bordeaux avec à la clé 400 emplois et 100 millions d’euros d’investissement. En cause, le moratoire gouvernemental de trois mois sur l’énergie solaire. La nouvelle ministre de l’écologie*, Nathalie Kosciusko-Morizet s’est expliqué sur France-Info (Voir la vidéo ci-dessous qui intègre ses commentaires sur le nouveau Prêt PTZ+ et les passagers bloqués aux aéroports parisiens par la neige ) avant la concertation avec les professionnels prévue début 2011. Si les particuliers sont épargnés par ce dispositif avec des installations de -30m2 (-3 kWh) , la quasi-totalité des projets industriels sont en revanche au point mort. « Un coup de froid brutal » pour le Syndicat des énergies renouvelables (Ser) qui estime que « des milliers d’emplois seront supprimés à court terme alors qu’il s’agit d’une des seules branches qui peut s’enorgueillir d’avoir déjà créé 20 000 emplois depuis 2009. ». Domoclick fait le point sur les faits qui se heurtent à une certaine incohérence gouvernementale, la position d’EDF Energies Nouvelles, le Syndicat National des Installateurs du photovoltaïquet qui n’a pas un an et au recours déposé devant le Conseil d’Etat


Aéroports : "un défaut d’information" (NKM)
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L’effet d’aubaine des tarifs de rachat avantageux pour l’électricité photovoltaïque montre aujourd’hui ses limites au delà de son succès. Pour limiter cette bulle spéculative, le gouvernement a suspendu pour trois mois l’obligation d’achat de la production photovoltaïque, provoquant l’incompréhension et la colère des acteurs de la filière. En particulier le SER (Syndicat des Energies Renouvelables) qui soutient la filière industrielle photovoltaïque française. « Un développement sous-estimé , selon elle, et méconnu au moment de décisions cruciales » comme ce décret du 9 décembre ! « Aux côtés des développeurs et des installateurs, il existe des industriels qui ont pour ambition de développer une industrie photovoltaïque française, capable de se positionner dans la concurrence internationale », rappelle André ANTOLINI, Président du SER.

Un moratoire nécessaire ?

Le gouvernement justifie sa décision par la trop grande quantité de projets « entrés en file d’attente » pour obtenir la proposition technique et financière d’ERDF, sésame indispensable pour tout raccordement au réseau. « 4 Giga Watt de projets sont en attente », explique Serge Poignant, président de la Commission des affaires économiques de l’Assemblée Nationale. « Ce moratoire est nécessaire pour faire éclater la bulle spéculative. » Un avis que ne partage pas Arnaud Mine, président de Soler, branche photovoltaïque du Ser. « En réalité, 65% des projets déposés auprès d’ERDF en 2010 ne sont pas viables et n’auraient jamais aboutis !

Stopper la spéculation sur le photovoltaïque

Selon la ministre, c’est l’apparition d’une « bulle spéculative » en cours de gonflement, et alimentée par les subventions d’état, touchant les énergies renouvelables qui justifient la mise entre parenthèses actuelle du développement de la filière photovoltaïque. Ce moratoire, explique la ministre, concerne uniquement les projets « dans la file d’attente » et non les particuliers ou les projets « bien avancés ».

Rééquilibrer le marché de la filière photovoltaïque

La ministre de l’Ecologie explique que « 90 % des panneaux installés en France viennent de Chine (…). On n’a pas été assez stricts sur les critères d’intégration au bâti (…) souligne-t-elle au micro de France Info. Si Nathalie Kosciusko-Morizet se satisfait du volume d’installation de panneaux photovoltaïque, elle explique qu’au niveau de l’emploi et de l’environnement les répercutions attendues ne sont pas au rendez-vous, en particulier parce que les panneaux importés de Chine, moins cher qu’en Europe, ne satisfont pas sur la balance CO2 en produisant 1,8 fois plus de CO2 qu’un panneau fabriqué en France. C’est, apparemment, ce constat nuancé qui a motivé la décision d’établir un moratoire sur la filière photovoltaïque. « On n’a pas la filière complète qu’on voudrait mais juridiquement il n’est pas possible de choisir entre les bons projets et les moins bons projets, il a donc fallu les suspendre tous. »

Réaction des professionnels du photovoltaïque

Les professionnels du secteur ont décidé de déposer un recours au conseil d’état contre le décret mettant en place le moratoire de 3 mois sur les conditions commerciales du photovoltaïque.

« EDF veut le monopole de l’énergie photovoltaïque, peu importe la casse au niveau des installateurs »

Sous ce titre, le SYNAIP, syndicat d’installateurs communique : « La concertation sur la mise en place d’un nouveau cadre de régulation pour la filière photovoltaïque s’est ouverte le 20 décembre 2010 à Bercy sous la présidence de Jean-Michel Charpin et Claude Trink dans une ambiance plutôt électrique… L’absence remarquée de représentants des ministères concernés par le décret du 09 décembre , rapporte ce 26 décembre le blog Tecsol de sources sures, a placé d’emblée le débat dans un contexte exclusivement technique, partant du principe que les acteurs de la filière ne reviendront pas sur le dernier décret.

En dehors de toutes les règles en vigueur : EDF Energies Nouvelles

La surprise nous est venue de la file d’attente RTE. 2300Mw (70 dossiers) de demandes initiales, datant principalement du deuxième semestre 2010 et portant sur des grandes centrales au sol. EDF EN a reconnu être à l’origine d’une grande partie de cette file (1000Mw) dans le but d’écouler les 150Mw de production de la future usine de panneau solaire de FIRST SOLAR et EDF EN (projet suspendu depuis le décret du 9 décembre). Suite à la publication de ces chiffres, il apparaît clairement qu’EDF et ses filiales ont joué un rôle important dans la surchauffe de la file d’attente et la déstabilisation de la filière complète » poursuit le blog Tecsol. Le SYNAIP est scandalisé que d’une part soient stigmatisés des projets spéculatifs avec application aux installateurs de mesures compromettant leurs emplois et leur survie, et que d’autre part, la filiale d’une entreprise ayant mission de service public et dont l’Etat possède 70% du capital soit l’une des principales responsables de cette situation. Le SYNAIP constate que le secteur du photovoltaïque est instrumentalisé par la politique d’un grand groupe d’Etat qui a pour objectif de mettre la main sur toute la filière. Il appelle tous les installateurs à se battre à ses côtés afin qu’ils ne deviennent pas de simples sous-traitants d’un grand groupe. »

La situation en Espagne

Comparativement, la capacité d’installations photovoltaïque en Espagne est passée de 460 à 3200 MW entre 2007 et 2008, au point que les investisseurs durent importer la majeure partie des panneaux solaires, les producteurs espagnols ne pouvant satisfaire la demande. Forte d’aides publiques très avantageuses mais dépassé par l’ampleur de cette bulle spéculative et ses conséquences sur les finances publiques – en 2009, le solaire photovoltaïque a coûté aux contribuables espagnols plus de 2,5 milliards d’euros – le gouvernement a drastiquement réduit les subventions, de 35% en 2008 puis de 40% en août 2010. L’éclatement de la bulle spéculative aura coûté plus de 30 000 emplois depuis 2008, d’après l’Association de l’industrie photovoltaïque espagnole.

Domoclick.com avec Tecsol

Sources:
Le blog Tecsol:
http://tecsol.blogs.com/mon_weblog/

France-info (Radio-France):
http://www.france-info.com

Le SYNAIP, seul Syndicat National des Installateurs du photovoltaïque, s’est constitué le 22 janvier 2010:
http://www.synaip.com/

* Nathalie Kosciusko-Morizet est ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement,