En fixant le prix de l’électricité nucléaire à 42 euros le mégawattheure MWh (au lieu de 31€) au 1er janvier prochain, le gouvernement a accordé une nette victoire à EDF et posé les bases d’une forte hausse des tarifs de l’électricité après l’élection présidentielle de 2012. La question tenait le secteur de l’énergie en haleine depuis des mois. Très politique, elle s’inscrit dans le cadre de la Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité (Nome), une loi adoptée en novembre par le Parlement pour doper la concurrence sur un marché ultra-dominé par EDF. Domoclick.com prépare une interview Exclusive sur le sujet avec une personnalité engagée pour la défense du consommateur

En vertu de ce texte, l’ancien monopole public va être contraint de vendre jusqu’à un quart de la production de ses centrales nucléaires à ses concurrents (GDF Suez, Poweo, Direct Energie).
Pour qu’elle entre en application, il restait toutefois au gouvernement à fixer le prix de vente de cette électricité nucléaire, connue sous le nom barbare d’Arenh, pour Accès régulé à l’Electricité nucléaire historique.
Le patron d’EDF, Henri Proglio, se battait pour obtenir 42 euros/MWh, seuil en dessous duquel il estimait que son entreprise se serait fait « piller ». Son grand concurrent GDF Suez réclamait lui 35 euros/MWh et rejetait d’un revers de main les demandes d’EDF, en les qualifiant d' »inacceptables ».

C’est finalement EDF qui a emporté la bataille, au terme d’un arbitrage rendu par le président Nicolas Sarkozy lui-même. Le gouvernement a tout juste ménagé une période de transition de six mois (du 1er juillet 2011 au 1er janvier 2012) pendant laquelle le prix de l’Arenh sera de 40 euros/MWh. « Contrairement à ce qui a été dit, le match n’était pas entre favoriser EDF ou défavoriser GDF », s’est défendu le ministre de l’Energie, Eric Besson, mardi. « Nous, la seule boussole, c’est l’intérêt général, la sécurité des Français et leur pouvoir d’achat », a-t-il assuré. Le ministre a cependant reconnu que le gouvernement voulait « conforter EDF », et « tenir compte pour l’avenir, par précaution, des travaux qu’EDF pourrait être amené à engager (dans ses centrales) après la catastrophe de Fukushima » au Japon.

La Bourse saluait une décision qui devrait doper les profits de l’entreprise publique : l’action EDF gagnait 5,03% à 27,97 euros à 11H30, réalisant la plus forte hausse de l’indice CAC 40. Moins à la fête, les associations de consommateurs dénonçaient quant à elles une décision qui « va mécaniquement faire flamber les tarifs de l’électricité », selon les termes de Caroline Keller, de l’UFC Que Choisir. « C’est faux, entièrement faux, et c’est une rumeur à laquelle je voudrais contribuer à tordre le coup », avait pourtant démenti par avance Eric Besson, assurant qu’il n’y avait « pas de lien mécanique » entre le prix de l’Arenh et les tarifs de l’électricité.

A court terme, le ministre a raison : la loi Nome n’impose pas de hausse immédiate des prix de l’électricité. Et le gouvernement pourra honorer sa promesse de ne procéder qu’à une « légère augmentation » des tarifs d’ici à l’élection présidentielle de 2012. Mais avant la fin 2015, les prix devront s’aligner sur le niveau de l’Arenh, selon l’article 13 de la loi Nome. Dans un document de travail transmis en mai 2010 aux députés, la Commission de Régulation de l’Energie avait ainsi estimé que les tarifs pour les particuliers devraient être augmentés de 25 à 30% d’ici à 2015 si le prix de l’Arenh était fixé à 42 euros.

Actuellement, les Français payent l’électricité nucléaire environ 31 euros/MWh, soit 36% moins cher, selon le régulateur. De nombreux spécialistes estiment toutefois que le prix acquitté par les consommateurs est artificiellement bas et ne prend pas en compte l’intégralité des coûts de production de l’énergie nucléaire.

Domoclick.com et l’AFP