Pour des motifs tant écologiques que budgétaires, les véhicules qui roulent au gazole sont dans le viseur du gouvernement. Les ministres concernés cherchent – péniblement – des mesures adaptées. Ce débat arrive en pleine ouverture du salon de l’Auto de Genève au moment où Renault présente sa berline populaire, Zoé, tout-public, tout électrique. Et ce débat cristalise, à lui seul, toutes les contradictions de la situation française qui a protégé le Diesel quand d’autres pays l’interdisaient déjà. Entre efficacité environnementale, impact économique, contraintes budgétaires, justice sociale et santé publique (40 000 morts par an), il faudra bien choisir en pénalisant le moins possible. Propositions de solutions et de précautions aux populations trop exposées au CO2**

L'édition du quotidien Les Echos du 4 mars 2013

Une « prime de conversion » ? Sans plus de précision, c’est la piste communément évoquée, hier, par la ministre de l’Environnement, Delphine Batho, et le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, dans le but de réduire le nombre de véhicules diesel en France. Pour le reste, les deux ministres peinent à accorder leurs violons.

Une hausse de la fiscalité sur le diesel ? « Incontournable », a redit, hier, la ministre de l’Environnement, mais elle sera « progressive » et accompagnée de mesures pour atténuer ses conséquences sur le pouvoir d’achat. Au contraire, Arnaud Montebourg s’y oppose : « C’est un impôt sur des gens qui ont des problèmes de pouvoir d’achat », a-t-il dit. À Matignon, on indique seulement que la « convergence » des taxations essences et diesel est une « piste de travail ».

Revenir à la prime à la casse ? « Non », a tranché Arnaud Montebourg, chantre du made in France. Une telle prime pénaliserait les voitures françaises dont la spécialité est le diesel.

Le diesel pollue ? Oui. Et c’est un argument majeur pour Delphine Batho. En juin 2012, l’Organisation mondiale de la santé a classé le diesel « cancérogène certain », notamment en raison des particules fines qu’il émet. Sauf que… Ce qui pollue, ce sont les vieux véhicules diesel (27 % du parc), rétorquent les constructeurs français. Les nouveaux moteurs sont plus « propres », disent-ils, en brandissant la menace pour l’emploi en cas de durcissement de la fiscalité sur le diesel.

Le diesel peut rapporter gros à l’État ? Oui. Aujourd’hui, le gazole est moins taxé (0,43 € par litre) que l’essence (0,61 € par litre). L’automobiliste s’y retrouve : 1,41 € le litre de gazole dans un moteur plus robuste, et qui consomme moins, contre 1,6215 le litre de sans-plomb 95. Or, en alignant la taxe du diesel sur celle de l’essence, l’État pourrait faire rentrer près de 7 milliards d’euros dans ses caisses, selon la Cour des comptes. Un argument de poids en période de disette budgétaire. Mais pour les automobilistes qui roulent au diesel (60 %), les agriculteurs et les routiers, ce serait de l’argent en moins dans les caisses et les porte-monnaies.

Préserver l’environnement sans trop déstabiliser une filière auto déjà mal en point et faire entrer de l’argent dans les caisses de l’État sans trop entamer le pouvoir d’achat des Français : c’est la difficile équation que doivent résoudre les deux ministres. Premières mesures applicables en 2014.

** LES PRECAUTIONS

les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA***) relèvent actuellement des concentrations de particules PM10 dans l’air supérieures au seuil d’information de 50 µg/m3 (micro grammes par mètre cube) dans plusieurs zones sur le territoire français.

Dans les régions concernées, il est demandé notamment :

– de ne pas utiliser les cheminées à bois (sauf en cas de chauffage principal),
– de limiter l’usage des véhicules automobiles, notamment les véhicules diesel non équipés de filtres à particules (antérieurs à 2011),
– de réduire les vitesses sur les voies rapides et autoroutes,
– de respecter l’interdiction de brûlage de déchets verts.

Ces mesures d’urgence viennent renforcer des actions de fond qui ont donné lieu à l’élaboration d’un plan particules national et de plans de protection de l’atmosphère dans 38 zones ; ces plans sont pour certains validés ou encore en cours d’élaboration ou de validation par enquête publique.

Un plan d’urgence pour la qualité de l’air mis en place le 6 février 2013 dans le cadre du Comité interministériel pour la qualité de l’air (CIQA) prévoit par ailleurs de repenser les moyens de transport existants, les politiques de mobilité et les moyens de chauffage domestique dans les agglomérations les plus concernées par les pollutions. 38 mesures classées par priorités devraient déboucher sur des actions à la fois réglementaires et incitatives, avec l’implication des collectivités, dans ces secteurs des transports et du chauffage à l’origine d’émissions de poussières.

L’information et les prévisions sur la qualité de l’air sont disponibles en temps quasi-réel pour la situation régionale sur les sites Internet des 26 organismes agréés pour la surveillance de la qualité de l’air : www.atmo-france.org

Au niveau national, le site www.prevair.org propose des cartes de prévisions à l’échelle nationale et européenne et informe de la nature des épisodes de pollution de l’air.

AFQA: http://www.atmo-france.org/fr/

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