Dans sa décision du 26 juin 2003 sur la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit dont les règles de la commande publique, le Conseil constitutionnel a émis quelques réserves concernant le projet des contrats de partenariat rappelle l’Union nationale des syndicats français d’architectes (UNSFA).
En particulier : ""la généralisation de telles dérogations au droit commun de la commande publique ou de la domanialité publique serait susceptible de priver de garanties légales les exigences constitutionnelles inhérentes à l’égalité devant la commande publique, à la protection des propriétés publiques et au bon usage des deniers publics"". Or, dans l’ordonnance signée le 17 juin 2004, dans le cadre de la loi d’habilitation visée ci-dessus, les conditions censées délimiter le champ d’application de ce type de procédure en généralisent au contraire l’usage. Les architectes ne pouvaient accepter ce dérapage s’insurge l’UNSFA. Le syndicat a donc déposé le 11 août 2004 devant le Conseil d’État un recours contre l’ordonnance sur les contrats de partenariat. Voici quelques extraits de ce recours. L‘ordonnance attaquée crée une nouvelle procédure de la commande publique. Cette procédure, – en englobant dans un contrat unique un certain nombre de prestations de nature très différente habituellement confiées à des titulaires distincts, – et en exigeant que les opérateurs prennent des engagements de résultats et de services sur une très longue période qui s’étendra généralement sur plusieurs décennies, – circonscrit inévitablement le nombre d’acteurs économiques susceptibles d’être valablement acceptés par la personne publique pour présenter une telle offre. Il s’agit bien d’une dérogation au droit commun de la commande publique, lequel impose l’égalité d’accès à la commande publique (principe à valeur constitutionnelle). Or, et EN PREMIER LIEU, l’ordonnance attaquée généralise le droit de recourir au contrat de partenariat, alors que cette procédure déroge au droit commun de la commande publique En effet, les articles 2-a et 14 (L.1414-2-a du CGCT) de l’ordonnance déterminent les situations qui devront avoir été vérifiées (au stade préalable d’une évaluation) pour avoir recours à de tels contrats, en particulier : ""l’évaluation"". montre bien que, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n’est pas objectivement en mesure de définir seule et à l’avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d’établir le montage financier ou juridique du projet. En ""prétendant""ainsi délimiter les situations susceptibles de justifier le recours aux contrats de partenariat, l’ordonnance décrit au contraire le cas le plus général (pour ne pas dire ""universel"") de la commande publique ! Les personnes publiques n’étant jamais en même temps programmistes, architectes, géomètres, ingénieurs, économistes, juristes, conseillers en financement public, etc, ne peuvent jamais définir seules et à l’avance les moyens de répondre à leurs besoins et font toujours appel à des professionnels extérieurs pour les aider à le faire. Pour exemple, la vocation des architectes est d’assurer, pour le compte des maîtres d’ouvrage, (entre autres missions d’assistance du début à la fin des opérations), la conception des bâtiments, équipements, aménagements urbains ou paysagers, ouvrages d’art, ce qui constitue bien une partie essentielle de la définition des moyens susceptibles de répondre aux besoins des personnes publiques. Les autres professionnels cités à l’alinéa ci-avant participent, eux aussi, dans leur spécialité, à cette définition des moyens. La ""complexité du projet"" ne constitue pas non plus une délimitation sérieuse des situations susceptibles de justifier le recours aux contrats de partenariat. En effet, la complexité ne tient pas seulement à la difficulté d’un programme, mais beaucoup plus à la multiplicité des réglementations complexes qui s’imposent à toutes les opérations (permis de construire par exemple, sécurité, accessibilité, etc), à la diversité des intervenants (coordonnateur SPS par exemple), au nombre des lots de construction (couramment entre 15 et 30), aux garanties que doivent assumer tous les constructeurs, etc. Il est facile de démontrer la complexité de n’importe quel projet. En conclusion, en édictant une condition décrivant une situation générale pour recourir à un type de contrat qui rompt l’égalité d’accès à la commande publique, l’ordonnance viole un principe à valeur constitutionnelle. Il est précisé, en outre, que la deuxième condition évoquée par les articles 2-b et 14 (L.1414-2-b du CGCT) de l’ordonnance (analyse comparative…) restera une condition de pure forme Il est certain que divers opérateurs se mettront au service des collectivités territoriales pour leur monter des ""dossiers types d’évaluation préalable"", ce qui démontrera l’inefficience d’une telle condition. EN SECOND LIEU, l’ordonnance attaquée présente le contrat de partenariat, une fois passée l’étape de l’évaluation (une des conditions étant acquise et l’autre étant de pure forme) comme une procédure libérant la personne publique de beaucoup d’attention, de travail, d’obligations et de risques divers. Elle est même présentée comme devant lui faire gagner du temps, (ce qui est pourtant incertain). Cela constitue indiscutablement une incitation pour les personnes publiques à recourir à ce type de procédure. Les analyses auxquelles les architectes (et divers autres acteurs économiques) ont procédé, conduisent à penser que les opérations réalisées dans le cadre d’un contrat de partenariat : – pourraient s’avérer plus onéreuses que celles réalisés avec les procédures habituelles de la commande publique (ne serait-ce que pour des coûts plus élevés du financement), – présenteraient des risques pour la personne publique, quant à l’adéquation des ouvrages ou équipements créés, à la bonne exécution du service dont elle aura à s’acquitter, – et présenteraient des difficultés juridiques, techniques et financières pour la personne publique désireuse d’adapter son équipement à l’évolution de ses besoins pendant toute la durée du contrat. Représentant les architectes, qui sont aussi des contribuables, l’UNSFA demande au Conseil d’État de censurer une ordonnance qui incite les collectivités territoriales à prendre, pour des durées qui dépassent largement la durée du mandat des élus, des engagements incertains quant au résultat qualitatif et dont le coût sera supérieur, pour les finances de la collectivité, à celui des opérations réalisées avec les procédures de droit commun.
Source : http://www.batiactu.com