Transmettre des données informatiques à partir de la lumière, c’est aujourd’hui possible grâce au LiFi. Confidentielle, économique et écologique, cette technologie innovante ultra-rapide (près de 1000 fois supérieure) et sans fil s’apprête à déferler dans notre quotidien. Portrait d’une invention à haut potentiel par Ariane Charriau, journaliste à Thinkovery. Thinkovery est une startup nantaise qui a lancé en septembre 2013 un nouveau média sur internet. Via des vidéos courtes, ludiques, enrichies d’illustrations graphiques, Thinkovery propose d’éclairer les grands enjeux contemporains à travers le prisme des sciences et de la recherche. Un bel exemple avec la découverte du LiFi !

L’idée du LiFi (light fidelity en raccourci pour calquer “WiFi”) n’est pas récente. On la doit à Graham Bell, l’inventeur du téléphone, lorsqu’il parvient, en 1880 à l’aide de son photophone, à transmettre sur plusieurs centaines de mètres le son de sa voix grâce à la lumière du Soleil. Mais cette expérimentation tombe dans l’oubli jusqu’à l’émergence au Japon, à l’aube du XXIème siècle, des diodes électroluminescentes (Led). Les Led étant, avec les lasers, les seules sources de lumière capables de commuter très rapidement, elles permettent de ressusciter l’invention et de lui donner son envol. Le principe est simple. En informatique, tous les fichiers numériques (documents, images, vidéos, etc.) sont composés d’une succession de 0 et de 1. Or, une Led peut transmettre un bit 1 si elle est allumée et un bit 0 si elle est éteinte. Comme son signal lumineux peut alterner jusqu’à un milliard de fois par seconde, elle peut retranscrire les séries de 0 et de 1 en instantané dans une sorte de morse optique que les smartphones et tablettes sont capables d’interpréter. Ces alternances, tellement rapides, sont invisibles à l’œil nu et la transmission de données s’effectue sous la lumière d’une lampe à Led. Un routeur est installé pour alimenter le système d’éclairage, ainsi qu’un décodeur sur les appareils mobiles afin de décrypter les signaux lumineux. La transmission de contenus multimédias, si prisée dans nos vies actuelles, trouve avec le LiFi, WiFi optique, un nouvel allié.

Un potentiel 1 000 fois supérieur à celui du WiFi

« Avec les Leds, on pourrait potentiellement créer le réseau de communication le plus dense de la planète » avance Suat Topsu, enseignant-chercheur à l’UFR de Versailles et fondateur de l’entreprise Oledcomm. Les possibilités de débit du LiFi sont gigantesques : jusqu’à 1 000 fois supérieures à celles du WiFi. En laboratoire, on peut atteindre une puissance de 10 gigabits. Un volume démesuré pour l’usage d’un utilisateur moyen puisque les appareils actuels, d’une capacité oscillant entre 30 et 60 mégabits, ne peuvent recevoir de tels débits. Mais les besoins en connexion s’intensifient toujours plus. L’aspect environnemental est par ailleurs un atout primordial. Le LiFi utilise et encourage l’éclairage à partir de Leds peu consommatrices d’énergie et d’une grande durée de vie. Cette technologie pourrait aussi permettre de réduire la pollution électromagnétique, dont le seuil fixé par la Commission européenne est de trois volts par mètre au maximum. Or dans certains endroits hyper-connectés, comme le quartier d’affaires de La Défense à Paris, la densité d’ondes électromagnétiques peut s’élever à dix volts par mètre. Autre point positif, le LiFi n’utilise pas ces ondes, mais uniquement le spectre optique, ce qui ne représente – a priori – aucun risque pour la santé.

Economiquement parlant, l’invention solaire est une véritable alternative au WiFi. Actuellement, pour pouvoir utiliser cet ensemble de protocoles de communication sans fil, les entreprises sont contraintes de faire appel aux bandes-radios. Mais ces dernières sont saturées car les plages de fréquence sont prises d’assaut et coûtent cher en termes de licence d’exploitation. Ce double problème est résolu par le LiFi, puisqu’il ne nécessite aucun canal particulier et que l’usage de la lumière n’engendre aucun coût. L’internet par le Soleil a également l’avantage de s’utiliser dans les endroits où les ondes ne passent pas, comme les avions, les tunnels, les parkings ou sous l’eau. Et puisque la lumière ne traverse pas les murs, aucun piratage n’est possible avec cette technologie. Autant d’atouts susceptibles d’intéresser banques, bases militaires, services secrets, en un mot, tous les lieux hautement sécurisés, ainsi que certaines institutions comme les écoles qui souhaitent prohiber l’usage du WiFi.

Un marché de plus de 100 milliards de dollars

Mais la partie est encore loin d’être gagnée. Entièrement basée sur la lumière de Leds, cette technologie s’arrête subitement dès que la source lumineuse disparaît. Suat Topsu reconnaît en effet le problème et en déduit qu’il faut faire « le choix entre un haut débit sans mobilité ou l’inverse ». Concernant les portables, le problème s’est réglé de lui-même. En offrant un « panier de technologies », les futurs smartphones s’adapteront aux situations et seront capables de choisir entre WiFi, LiFi ou 3G. « C’est ce que l’on appelle la 5G », précise Suat Topsu. « C’est pourquoi le LiFi ne concurrence pas le WiFi. Ils sont au contraire complémentaires. »

Par ailleurs, même si les Leds déjà présentes sur le marché sont compatibles avec le LiFi, il reste à équiper de très nombreuses sources d’éclairage. Or cette transition pourrait se révéler complexe car le coût des Leds est de 10 à 30 % plus élevé que celui de banales ampoules. Mais « le prix de ces versions alternatives baisse de 5 à 7 % par an et le surcoût initial est rapidement compensé par les nouveaux services offerts par le LiFi (accès à internet notamment) », ajoute le chercheur-entrepreneur. Les professionnels du marketing se sont déjà appropriés cette nouvelle technologie.

Des lieux d’expos aux lieux festifs, comme le stade de Roland Garros

Dans les faits, l’idée fait son chemin et plusieurs lieux publics ont expérimenté cette technologie innovante, comme l’ensemble de musées Grand Curtius à Liège, le Mémorial de Vendée ou encore le stade Roland Garros qui a retransmis les matchs du prestigieux tournoi de tennis 2014 sur le stand de France Télévision à l’aide de ce moyen. A l’échelle des collectivités territoriales, l’éclairage public à Leds, impulsé par la société française SLA (Smart Lighting Alliance), devrait également ouvrir les possibilités de transmission de données locales : la ville de Meyrargues (Bouches-du-Rhône) est pilote sur le projet et la Ville de Nice pourrait commander ce type d’éclairage pour équiper ses rues. Tout l’espace urbain serait ainsi couvert. Il suffira alors aux habitants de se munir d’un récepteur (dongle) applicable sur les smartphones (2 euros), et de télécharger gratuitement le logiciel correspondant. Les smartphones se transformeront alors en lecteurs LiFi.

Aujourd’hui, l’avenir du LiFi se situe essentiellement dans sa commercialisation. Son marché est estimé à plus de 100 milliards de dollars dans le monde pour la décennie à venir, car sur les traces du Japon et de la France, premiers à s’intéresser à la poule aux œufs d’or, l’Allemagne, les États-Unis et la Chine montrent leur vif intérêt pour cette technologie depuis 2010. La France, leader mondial en la matière avec l’entreprise Oledcomm, ne devrait ainsi pas longtemps garder sa longueur d’avance, de 18 mois environ. Suat Topsu espère surtout que les pionniers du LiFi arriveront à créer une bonne synergie pour déployer cette technologie lumineuse à bon escient.

Source: Ariane CHARRIAU pour Thinkovery

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Jérome Robert
Ex concepteur-redacteur multimedia, Jerome ROBERT est co-fondateur du site Domoclick.com créé en 2000 à Albi (81000 FRANCE) sur l'innovation et la communication dans l'habitat. Il a co-écrit avec Laurent FABAS (ingénieur thermicien) le "Guide de la maison économe, la solution écologique" (Eyrolles pratique 2008) !