Le Brésil rend hommage à l’architecte Oscar Niemeyer, le « poète des courbes » décédé le 5 décembre à l’âge monumentale de 104 ans qui déclarait « le béton permet toutes les fantaisies ». Au cinéma c’est le réalisateur Philippe de Broca qui a spectaculairement mis en scène les oeuvres de Niemeyer dans une séquence de 5’48 » de « L’homme de Rio » tourné en 1964 avec Jean-Paul Belmondo dans le rôle-titre. Une folle chasse à l’homme , en smocking blanc, à revoir absolument dans le paysage architecturale le plus audacieux de la capitale futuriste du Brésil, Brasilia signé Oscar Niemeyer. Chapeau de Broca, bravo Belmondo et merci Monsieur Oscar Niemeyer qui nous laisse un patrimoine à traverser les siècles.

Le Brésil a rendu hier un hommage national à Oscar Niemeyer à Brasilia, capitale futuriste surgie de la vision de cet architecte majeur du XXe siècle mort mercredi à l’âge de 104 ans. Au Palais du Planalto, l’un des bâtiments emblématiques de l’architecte et siège de la présidence, où l’attendaient les plus hautes autorités de l’Etat , la présidente du Brésil Dilma Rousseff, le visage fermé, a applaudi l’arrivée du cercueil, avant de s’en approcher, en tenant par le bras la veuve d’Oscar Niemeyer, Vera Lucia Cabrera. Les personnalités, dont la quasi-totalité des ministres, ont défilé devant le cercueil du « poète des courbes ». De nombreux membres de la famille assistaient à la cérémonie. Le Palais du Planalto a ensuite été ouvert au public, où les habitants de Brasilia ont rendu un dernier hommage au « père » de leur ville.

L’architecte est inhumé aujourd’hui dans l’intimité à Rio, au cimetière de Botafogo, après un ultime hommage des cariocas à l’Hôtel de ville.
« Je suis triste. C’est l’âme de Brasilia qui s’en est allée. En même temps, je ne connais personne qui ait eu une vie aussi remplie. Il a travaillé pendant 70 ans et réalisé tous ses rêves », a témoigné dans la matinée une Brésilienne originaire de Brasilia, Rita Siriaka.

« Le Matisse de l’architecture »

Inspiré dans sa jeunesse par Le Corbusier, Niemeyer, qui a su imprimer des courbes sensuelles au béton, a reçu l’hommage des plus grands architectes actuels. Il était le « Matisse » de l’architecture, selon le Français Jean Nouvel. La Britannique d’origine irakienne Zaha Hadid, a salué le « virtuose » à la « sensibilité spatiale » qui l’a « encouragée sur la voie d’une architecture d’une fluidité totale ». »Il m’a appris que l’architecture est importante, mais que la vie est plus importante et, en fin de compte, il laisse son architecture en héritage. Comme l’était l’homme lui-même, elle est éternellement jeune », a pour sa part commenté le Britannique Norman Foster. Plusieurs pays, comme l’Algérie, Cuba et la France, ont également rendu hommage à Niemeyer. Ce communiste de coeur a notamment construit le siège du Parti communiste français à Paris où il s’était exilé pendant la dictature militaire au Brésil.

Le président français François Hollande a salué « l’homme engagé dont les convictions ont toujours été mises au service de son talent ».L’ex-président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva s’était dans la matinée « joint au Brésil tout entier dans le deuil ». »La monumentale Brasilia, où il a laissé la marque de son art et concentré ses rêves d’une ville qui puisse abriter avec tendresse et confort pauvres et riches, hommes ordinaires ou extraordinaires, sera toujours l’expression maximale de son génie et de sa générosité », avait-il commenté. Niemeyer répétait qu’être centenaire « était une merde » et que sa seule joie était de voir un Brésil devenu plus « égalitaire grâce à Lula » (2003-2010).Né le 15 décembre 1907 à Rio, dans une famille bourgeoise d’origine allemande, portugaise et arabe, Oscar Ribeiro de Almeida de Niemeyer Soares, a participé à la réalisation de plus de 600 oeuvres en 70 ans de carrière, dont le siège de l’ONU à New York, ou le sambodrome à Rio de Janeiro.

« J’ai du retard dans mon travail »

C’est le président Juscelino Kubitschek, qui lui donnera « la joie » de construire ex-nihilo Brasilia, avec l’urbaniste Lucio Costa et le paysagiste, Roberto Burle Marx.
« On voulait faire des immeubles qui provoquent une certaine stupeur parce qu’ils étaient différents », avait-il déclaré dans une interview à l’AFP.
Inaugurée le 21 avril 1960, Brasilia, dont il a réalisé les bâtiments phares, lui a fait remporter d’innombrables prix, comme le Pritzker (le Nobel d’architecture) en 1988. Le quotidien O Globo a publié une photo du patriarche, son éternel cigarillo à la main, scrutant la plage de Copacabana depuis la baie vitrée arrondie de son atelier de Rio. Sa veuve Vera Lucia Cabrera, 66 ans, a confié que pendant son hospitalisation, il lui disait: « je dois sortir, j’ai du retard dans mon travail ».

Domoclick.com avec Yana MARULL pour l’AFP

SA VIE, SON OEUVRE:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Oscar_Niemeyer