Parvenir à un « bon état » écologique et chimique de toutes les eaux européennes d’ici 2015, tel est l’objectif fixé par le cadre européen sur la protection et la gestion de l’eau, adopté en 2000. Où en sont aujourd’hui les Etats membres dans sa réalisation ? Réponse d’ici à la fin de l’année 2012, dans le rapport que doit rendre la Commission européenne sur les progrès réalisés et l’état des eaux européennes. En attendant cet examen, ainsi que la définition d’une nouvelle approche générale sur la politique européenne de l’eau, le Parlement européen se penche sur les moyens de mieux appliquer la législation existante. La commission de l’Environnement, de la Santé publique et de la Sécurité alimentaire a en effet adopté le 30 mai le rapport d’initiative de Richard Seeber (PPE, Autriche) sur la mise en œuvre de la législation de l’UE relative à l’eau, qui sera soumis aux députés lors de la prochaine session plénière

 Une mise en œuvre lente et inégale sur la directive-cadre sur l’eau.

La directive-cadre européenne de 2000 sur la protection et la gestion de l’eau poursuit plusieurs objectifs : prévention et réduction de la pollution, promotion d’une utilisation durable de l’eau, protection de l’environnement, amélioration de l’état des écosystèmes aquatiques, atténuation des effets des inondations et des sécheresses. Elle impose aux États membres d’adopter des plans de gestion et des programmes de mesures adaptés à leurs bassins et districts hydrographiques, et de faire état des mesures mises en œuvre. L’objectif ultime de ce cadre est d’atteindre un « bon état » écologique et chimique de toutes les eaux communautaires d’ici à 2015. La Commission européenne établira son troisième rapport de mise en oeuvre en 2012, le précédent datant de 2009.

Bien que la directive-cadre sur l’eau (DCE) constitue, selon le rapporteur, une base législative solide et ambitieuse, sa mise en œuvre se révèle à la fois lente et inégale dans les États membres et les régions. Selon les députés de la commission parlementaire, la Commission européenne doit dès lors présenter une proposition législative favorisant l’adoption d’une politique de l’Union en matière de pénurie d’eau, de sécheresses et d’adaptation au changement climatique.

La commission a également pris acte du « plan de sauvegarde des eaux européennes » qui doit être élaboré par l’exécutif européen avant la fin de l’année, et constituer une étape importante de la feuille de route sur l’efficacité des ressources. Celui-ci présentera une réponse stratégique aux défis et lacunes liés au cadre actuel de la politique de l’UE en matière de gestion des ressources en eau.En amont de ces décisions, le rapport dresse ainsi les recommandations suivantes :

Utiliser l’eau plus efficacement

L’utilisation de l’eau doit être plus efficace et plus durable, en particulier dans les secteurs de l’énergie et l’agriculture mais aussi au niveau domestique.Le secteur énergétique est responsable d’environ 45 % des prélèvements d’eau dans l’Union, et l’agriculture de 33%.La durabilité des sources d’énergie traditionnelles et à faible émission de carbone, en particulier la bioénergie et l’énergie hydraulique, devrait selon les députés être évaluée en prenant en compte l’eau utilisée.

Dans le secteur de l’agriculture, l’introduction de technologies et de pratiques innovantes, une meilleure information, une meilleure sensibilisation des agriculteurs et des utilisateurs ainsi que le stockage de l’eau peuvent contribuer à cette efficacité.La réduction de la consommation d’eau, une priorité selon les députés, doit passer par le mesurage obligatoire de l’utilisation de l’eau dans tous les secteurs et pour tous les utilisateurs, y compris pour l’usage domestique, dans l’ensemble des pays de l’Union.

Contribuer à la réalisation des objectifs de biodiversité

L’eau étant au cœur de la plupart des écosystèmes, sa gestion efficace contribue au maintien de la biodiversité. Les députés prônent ainsi la reforestation et le rétablissement des zones humides, une meilleure prise en compte de l’eau dans le programme Natura 2000 ou encore l’utilisation du concept de « débits environnementaux », c’est-à-dire le régime de l’eau que l’on peut assurer à un cours d’eau, une zone humide ou une zone côtière pour préserver les écosystèmes.

L’accent est mis sur les risques considérables que posent la prospection et l’extraction de gaz de schiste pour les eaux de surface et les eaux souterraines, l’obligation de protéger les sols pour maintenir la qualité de l’eau, les difficultés d’accès à l’eau de certaines populations pauvres et rurales dans les régions souffrant de sécheresse qui doivent dès lors faire l’objet de mesures ciblées, et la nécessaire intensification de la lutte contre les rejets de substances polluantes, de plus en plus fréquents.Les députés soulignent la nécessité d’aborder la réutilisation et le recyclage de l’eau dans la législation de l’Union, en faveur notamment des régions sujettes au stress hydrique.

Disposer de données fiables

Le rapport note le manque de statistiques fiables sur les quantités d’eau, notamment les extractions et les fuites. La Commission est ainsi invitée à mettre en place une nouvelle série d’indicateurs fiables pour la comptabilité de l’eau, en collaboration avec l’Agence européenne pour l’environnement.

Encourager la recherche et l’innovation

Les députés jugent également important de favoriser la recherche et l’innovation sur l’eau et d’accompagner le développement de clusters européens dans ce domaine. Des fonds suffisants doivent être mis à disposition des projets de recherche sur les systèmes de récupération des eaux de pluie, les technologies de mesurage, les méthodes de surveillance et d’élimination des polluants chimiques et biologiques de sources ponctuelles ou diffuses, ainsi que les technologies visant les économies d’eau et l’utilisation rationnelle de l’eau en zone urbaine et rurale.

La Commission et les États membres sont par ailleurs invités à soutenir le partenariat européen d’innovation sur l’eau proposé par la Commission le 10 mai 2012. Comme l’ensemble des partenariats d’innovation européens (PIE) celui-ci serait un moyen de concentrer l’expertise et les ressources sur la politique de l’eau, en mobilisant et en reliant tous les acteurs concernés par-delà les politiques, les secteurs et les frontières, afin que la population bénéficie plus rapidement des avancées et de l’innovation.

Définir une approche globale de la protection de l’eau

Le rapport souligne la nécessité d’une meilleure cohérence et d’une meilleure intégration des objectifs relatifs à l’eau dans la législation au niveau européen, national, régional et local, en particulier la politique agricole commune et la politique de cohésion.

Mettre en place une tarification transparente et efficace

Les députés appuient l’application des principes du « pollueur-payeur » et de l' »utilisateur-payeur » grâce à des systèmes de tarification transparents et efficaces visant la récupération des coûts des services liés à l’eau, y compris les coûts environnementaux et les coûts en ressources. De nouvelles taxes pourraient inciter à réduire les activités nuisibles pour l’environnement. Toutefois, une eau salubre devrait être disponible à un prix abordable pour subvenir aux besoins de l’homme.

Sensibiliser et éduquer le public à la question de l’eau

La sensibilisation du public aux problématiques de l’eau pourrait, selon la commission parlementaire, passer par la généralisation du mécanisme du pavillon bleu, qui récompense les communes et les ports de plaisance pour leur politique d’amélioration environnementale, à l’ensemble des zones de baignade en Europe, y compris les rivières, les lacs et les étangs. Mais aussi par la mise en place de formations sur les économies d’eau et l’utilisation durable de l’eau à l’intention des professionnels du tourisme, ainsi que par l’introduction de systèmes efficaces d’approvisionnement en eau dans les bâtiments et les espaces publics afin de réduire la nécessité de l’eau en bouteille.

Renforcer la dimension internationale de la politique de l’eau.

Alors que l’atteinte précoce de l’objectif du Millénaire pour le développement des Nations unies en matière de sûreté de l’eau potable a été annoncée, plus de 800 millions de personnes utilisent encore une eau insalubre et l’objectif concernant les services d’assainissement de base est encore loin d’être atteint. Les eurodéputés invitent l’Europe à renforcer ses engagements au niveau international.

Sources

  • Version consolidée de la Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau – Europa

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