Savoir poser les bonnes questions fait parti de la réflexion du CSTB, son directeur de la prospective , Jean-Christophe Visier le démontre ici dans cette interview du CSTB d’une façon exemplaire avec les bonnes surprises de la comparaison entre l’énergie décarbonnée du neuf face aux bâtiments rénovés. Déjà dans les années 2000, Domoclick.com avait interviewé ce spécialiste sur la valeur-verte en immobilier***. Une réflexion façonnée par l’expérience qui s’avère toujours aussi pertinente !


Vidéo avec Jean-Christophe VISIER – Directeur Energie Environnement au CSTB

La rénovation bas carbone est un enjeu majeur pour le parc existant. En parallèle du label actuel E+C- et de la future réglementation RE 2020 pour le neuf qui intègrent la dimension carbone, la rénovation bas carbone des bâtiments existants prend un sens nouveau pour les concepteurs et maîtres d’ouvrage. Déconstruction ou rénovation, conservation de la structure, traitement des déchets et recyclage des matériaux pour une économie circulaire, la rénovation bas carbone demande obligatoirement une vision « cycle de vie ». Ecoutez pour cela la capsule « rénovation bas carbone des bâtiments existants» par un expert en la matière, Jean-Christophe VISIER.

« La rénovation bas carbone des bâtiments existants »

Rénover bas carbone, c’est penser cycle de vie du bâtiment. Si le label E+C- intègre le poids carbone de la construction, la rénovation possède un avantage environnemental considérable car le carbone en place peut déjà être économisé. Démolir, déconstruire, conserver certains ouvrages, recycler avec moins de déchets de chantier : la rénovation bas carbone est en droite ligne d’un bâtiment durable sans oublier sa dimension basse énergie pour que son exploitation énergétique soit la plus verte et décarbonée possible.

Philippe NUNES : Bonjour Jean-Christophe VISIER. 
Quelle est votre vision sur la Rénovation Bas Carbone ? 


-Jean-Christophe VISIER : Plus largement que la Rénovation Bas Carbone le sujet porte plus particulièrement sur les bâtiments existants. 
Nous voyons bien la RE 2020, le Label E+C- vont faire évoluer la construction neuve, et les professionnels se posent la question pour l’existant, que devons-nous faire ? 
En fait, il y a une série de questions qui se posent :

1°- Je suis en train de réaliser une rénovation, comment dois-je l’optimiser pour qu’elle soit performante sur le niveau du carbone ?

2° – Est-ce que j’ai intérêt dans ce cas-là à détruire mon bâtiment et à en reconstruire un autre, où est-ce que j’ai intérêt à rénover ?

3° – Une question que se posent les gestionnaires de parc : dans mon portefeuille, quel intérêt vais-je avoir à construire du neuf, à procéder à des rénovations ? que cela soit pour de la vente ou en acquisition ? 


Nous voyons que les acteurs du bâtiment sont en train d’essayer d’amener des réponses à tout cela. 
 Alors à cette question construire ou rénover, la vision de l’analyse du cycle de vie et la vision du carbone amènent un élément peut être un peu nouveau. Nous avions l’impression jusqu’à présent que le neuf c’était mieux.

Si on prend les labels sur le neuf en énergie, un bâtiment BBC neuf en gros c’est 50 kWh par m² et par an, un BBC rénové ce n’est que 80 kWh parce que ce n’est pas facile d’arriver à 50 kWh.
Par conséquent, on se disait même qu’un bâtiment rénové, c’est souvent moins bien que le neuf sur le plan énergétique, et bien quand on regarde le cycle de vie ce n’est pas forcément du tout le cas. 
Si vous faites une bonne rénovation avec une bonne isolation, pour que cela ne soit pas une passoire thermique, pour un bâtiment basse consommation et si vous regardez sur le plan du bas carbone globalement combien cela pèse, vous vous apercevez que le fait d’avoir économisé toute la structure du bâtiment que vous allez réutiliser, vous faites de l’économie circulaire du bâtiment. 


Cela peut conduire à ce qu’un bâtiment rénové peut être sur le plan environnemental aussi bon, voire meilleur qu’un bâtiment neuf, en particulier si vous regardez le sujet des déchets il n’y a pas photo, il vaut mieux rénover un bâtiment que détruire et reconstruire. Donc ça change un peu la vision des concepteurs et des maîtres d’ouvrages. 



Les méthodes et les approches Energie-Carbone sont en cours de développement. L’association BBCA en a développé une, HQE travaille sur le sujet, nous travaillons également avec l’ADEME sur une méthode de stratégie bas carbone et cela va permettre d’avoir des bases pour intégrer la notion bas carbone pour la rénovation de l’existant de la même manière que l’on procède aujourd’hui pour le neuf. Ainsi vont se présenter des bases pour faire des choix de manière éclairée, en matière d’impact sur le changement climatique correspondant à nos choix de citoyen sur notre environnement de demain. 



PN : Si en rénovation je focalise et fais une étude au m², ne risque-t-on pas en rénovation d’être meilleur globalement en termes de trace carbone et de réduction carbone que dans le neuf ? 


-J.C.V : On peut dans certains cas être meilleur, alors cela va imposer bien évidemment de baisser fortement les consommations pour que la phase exploitation devienne bonne, mais on a un gain énorme sur tous les éléments que l’on conserve, les fondations, les structures et éventuellement certains éléments de second œuvre et là, il y a un gain qui est vraiment très sensible. 



P.N : Donc, la Rénovation Bas Carbone est un vrai enjeu pour les acteurs et décideurs du bâtiment ? 

-
J.C.V : Il y a un vrai enjeu de penser carbone en rénovation, de penser cycle de vie mais il y a aussi un enjeu c’est que pour l’instant, dans la rénovation nous pensions seulement énergie, quantité d’énergie, nous ne pensions pas assez à la qualité de l’énergie, énergie décarbonée. L’approche bas carbone pousse aussi à se dire, attention, il va falloir aussi que j’utilise une énergie moins carbonée, renouvelable, de l’électricité et peut être que le gaz aujourd’hui non renouvelable devra être remplacé par du gaz renouvelable.

Source, le 18 déc 2018:
https://conseils.xpair.com/actualite_experts/renovation-bas-carbone-batiments-existants.htm?
Jean-Christophe VISIER – Directeur Énergie Environnement au CSTB

Depuis janvier 2019, Jean-Christophe VISIER est directeur de la prospective au CSTB après avoir été directeur Énergie Environnement du CSTB et avant d’entreprendre dans les années 1980 des travaux de recherche appliquée sur l’énergie et l’environnement dans la construction et l’immobilier.

*** INTERVIEW du 17 septembre 2007:
Interview de J.-C. Visier, Directeur Energie Santé Environnement du CSTB
https://www.domoclick.com/?s=CSTB
Domoclick.com avec le CSTB